08/12/2013

Ode à la spontanéité

ISMENE : Ecoute, j'ai bien réfléchi toute la nuit. Je suis l'aînée. Je réfléchis plus que toi. Toi, c'est ce qui te passe par la tête tout de suite, et tant pis si c'est une bêtise. Moi, je suis plus pondérée. Je réfléchis. 



Le tournis. Le tournis en face de ces yeux verts. Trop de pensées s'entrechoquent. La ligne du temps se brise. Mon coeur bat. Mesures irrégulières. Drôle de valse ! A quel moment ai-je pris sa main ? Je n'arrive pas à me souvenir, encore moins à me défaire de l'impression d'étrangeté de ce moment. Elle me sourit. Je pense trop, mince, je pense trop. Arrête. Arrête de penser. Qu'est-ce que je dois faire, merde ? J'ai tellement envie de poser mes lèvres sur les siennes, elle est si belle, résister est une torture. Je suis attiré, aimanté. Complètement paumé. 
Il y aura des conséquences, des conséquences de conséquences, le bazar dans ma vie déjà pas simple. Ma tête me dit, dors maintenant. Oui mais ma tête est en train de démissionner, et je ne sais pas du tout quoi faire. Elle me regarde, l'air grave ; elle a dû s'apercevoir de mon désarroi. Je crois qu'elle comprend ce qui se joue à l'intérieur de mon crâne. Ses yeux s'attardent sur chaque partie de mon visage. Je crois que je vais l'embrasser. Je ne devrais pas. Pas dans ma situation. Non, je ne devrais pas. Mais... Arrête de penser. Agis. 
Je la regarde me regarder. Elle a l'air de me trouver beau. Je crois que c'est comme ça que j'ai toujours voulu qu'une femme me regarde. Arrête ça, tu te fais du mal. Tu as trop réfléchi pour l'embrasser, maintenant, et elle ne le fera pas. Mais cette main sous la mienne, cette main qui ne se dérobe pas, cette petite main si sûre de vouloir rester... J'espère à présent. Je ne peux plus agir, mais je peux espérer. La main s'en va, mes doigts se referment sur le vide. Tristesse. Je ferme les yeux, je me dis qu'il faut que je dorme, que la magie de l'instant est rompue par ma faute. Et soudain ce contact sur ma joue. Cette paume sur mon visage. Elle regarde mes yeux ; elle regarde mes lèvres. Mes yeux ; mes lèvres. Elle s'approche. Elle sourit encore. Je ferme les yeux. Ses lèvres... Drôle de valse. 



ANTIGONE : Il y a des fois où il ne faut pas trop réfléchir.